classification de la diphénylguanidine
05/04/2024 0 min

Renforcer la classification de la diphénylguanidine utilisée pour fabriquer le caoutchouc

La diphénylguanidine est une substance utilisée principalement dans la fabrication du caoutchouc. Suite à son évaluation, l’Anses propose de renforcer sa classification au niveau européen pour mieux protéger la santé humaine contre les troubles neurologiques et les atteintes à la fertilité et au développement en particulier. Cette proposition de classification dans le cadre du règlement CLP (classification, étiquetage et emballage) est en consultation publique depuis le 18 mars sur le site de l’agence européenne des produits chimiques (ECHA), afin que toutes les parties prenantes puissent commenter ou apporter les informations complémentaires dont elles disposent sur cette substance.

Une substance utilisée en tant qu’intermédiaire pour fabriquer le caoutchouc

La diphénylguanidine (DPG) est une substance intermédiaire de synthèse utilisée principalement dans la fabrication du caoutchouc en tant qu’accélérateur de vulcanisation, qui permet de rendre le caoutchouc plus résistant face aux pressions et contraintes. Des résidus de cette substance peuvent être retrouvés dans des articles en caoutchouc comme les revêtements de sol, les chaussures, les jouets et les pneus. Elle a été également détectée dans l’eau de boisson et dans les poussières domestiques. Sa présence est rapportée dans l’environnement aquatique et semble associée à l’abrasion des pneus libérant des particules.

Des classifications renforcées pour protéger la santé humaine

La diphénylguanidine présente actuellement une classification harmonisée au niveau européen dans le cadre du règlement CLP. Lors du processus d’évaluation de la DPG dans le cadre du règlement REACH, l’Anses a conclu à la nécessité de réviser cette classification harmonisée. L’Agence a notamment identifié que le niveau de preuve concernant le caractère reprotoxique de la substance justifie un relèvement de sa classification, suite à la mise à jour de l’évaluation des différents effets de la substance au regard des dernières données disponibles.

Ainsi, l’Agence propose une évolution des classifications pour la santé humaine, en particulier pour les effets aigus cutanés et oculaires ainsi que la reproduction et le développement. Dans plusieurs études, la DPG s’est en effet montrée toxique par ingestion et corrosive pour les yeux chez le rongeur. De plus, de nombreuses données humaines ont mis en évidence des cas d’allergie à la DPG. La plupart de ces données sont des études rétrospectives conduites en milieu professionnel qui ont étudié la sensibilisation à la DPG chez des patients pour lesquels il y avait une présomption d’allergie aux gants en caoutchouc. Des études montrent enfin des effets de la DPG sur la fertilité et le développement chez le rat et la souris et des troubles neurologiques chez le rat.

 « Une classification en tant que substance reprotoxique de catégorie 1B  aura des répercussions directes sur la protection de la santé des travailleurs du fait des obligations de mise en place de mesures de prévention renforcées prévues dans le code du travail pour les substances cancérogène, mutagène et reprotoxique.» explique Alice Mateus, qui a évalué la DPG. L’Anses poursuit par ailleurs des travaux sur la substance dans le cadre d’une analyse de la meilleure option de gestion règlementaire (RMOA). Il s’agit de vérifier la nécessité de mesures d’encadrement réglementaire complémentaires, en tenant notamment compte d’une classification renforcée.

Enfin sur le volet environnemental, l’Anses propose une classification moins sévère. Sur la base de l’étude de biodégradation la plus récente et la plus fiable, la DPG est en effet considérée comme rapidement biodégradable. Elle présente un faible potentiel de bioaccumulation. Les études montrent une toxicité chronique pour les organismes aquatiques, l’algue étant l’espèce testée la plus sensible.

Pour toutes ces raisons, l’Anses propose que la DPG soit classée et étiquetée comme suit dans le cadre du règlement CLP :

 

Toxicité aiguë (ingestion); catégorie 3 (H301 : Toxique en cas d'ingestion). L’Anses a proposé d’utiliser la valeur de 110 mg/kg comme estimation de la toxicité aiguë (Acute Toxicity Estimate (ATE)) pour le classement des mélanges, sur la base d’une étude chez le rat ;

Irritation cutanée, catégorie 2 (H315, provoque une irritation cutanée) ;

Lésions oculaires graves ; catégorie 1 (H318 : Provoque des lésions oculaires graves) ;

Sensibilisation cutanée ; catégorie 1A (H317 : Peut provoquer une allergie cutanée) ;

Toxicité pour la reproduction ; catégorie 1B (H360FD : Peut nuire à la fertilité. Peut nuire au fœtus) ;

Toxicité spécifique pour certains organes cibles (exposition répétée) ; catégorie 2 (H373 : risque présumé d'effets graves pour le système nerveux central à la suite d'expositions répétées ou d'une exposition prolongée) ;

Danger pour le milieu aquatique ; toxicité chronique Catégorie 3 (H412, Nocif pour les organismes aquatiques, entraîne des effets néfastes à long terme).

La proposition de classification mise en consultation publique

 

La proposition de classification harmonisée pour la DPG a été mise en consultation publique sur le site internet de l’ECHA le 18 mars 2024 pour une période de deux mois. Cette consultation vise à permettre à toutes les parties prenantes de commenter ces propositions, en apportant le cas échéant des arguments scientifiques complémentaires et des informations dont elles disposent. Les commentaires peuvent être transmis par l’intermédiaire d’un formulaire dédié sur le site de l’ECHA.

À la suite de cette étape de consultation, l’Anses sera chargée de répondre aux commentaires reçus. La proposition initiale, les commentaires et les réponses apportées par l’Anses seront portés à l’analyse du Comité d’évaluation des risques de l’ECHA, qui rendra ensuite son avis concernant l’actualisation de la classification de la DPG.

Sur la base de cet avis, la Commission européenne élaborera ensuite les textes réglementaires permettant d’inclure la classification proposée dans le règlement CLP.

Le règlement relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage (CLP)

 

Le règlement relatif à la classification, l’emballage et l’étiquetage des produits chimiques (CE n°1272/2008), dit règlement CLP, est une législation en vigueur dans l’Union européenne dont l’objectif est d’assurer la protection des travailleurs, des consommateurs et de l’environnement vis-à-vis des substances chimiques. Il vise en particulier à identifier les dangers qu’une substance ou mélange de substances peut présenter du fait de ses propriétés physico-chimiques, de ses effets sur la santé et sur l’environnement.

Ce règlement définit comment doivent être classés, étiquetés et emballés ces substances et mélanges. Il a également des impacts sur d’autres réglementations européennes en capacité de traduire les caractéristiques de danger en exigences accrues, pouvant aller jusqu’à des décisions d’interdiction ou des obligations de substitution.

Une fois la substance ou le mélange classé au regard des dangers identifiés, un étiquetage approprié permet d’informer l’utilisateur sur ces dangers en s’appuyant sur des pictogrammes et des fiches de données de sécurité. Sa mise en œuvre relève de la compétence de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA).